Pour, les pilotes de brousse, ces preux chevaliers du
ciel, on élabora des montures dignes d'eux et de leur
mission. C'est pourquoi on imagina de fiers des-
triers, dans la mesure où un avion de brousse était
défini par l'usage qui en était fait. Diverses configu-
rations ont été utilisées au fil du temps. Néanmoins,
un certain nombre de caractéristiques se retrou-
vaient fréquemment, car elles étaient particulière-
ment utiles pour des avions destinés à cet usage.
D’abord, un train d'atterrissage avec deux roues princi-
pales à l'avant (on pouvait y interchanger des flotteurs,
des flotteurs + roues, des skis, des skis + roues) et une rou-
lette de queue, ce qui diminue le poids et la traînée et permet
d'augmenter la charge utile ainsi que de réduire les
contraintes qui s’appliquent à une roue de nez.
Puis des ailes en position haute afin de faciliter le charge-
ment et le déchargement (durant ces opérations les ailes
hautes sont moins exposées que celles en position basse).
Aussi, la position haute permet une meilleure visibilité vers
le bas durant le vol et limite les risques de dégâts au moment
des atterrissages et des décollages.
Avec ces exigences deux se démarquèrent particulièrement…
Le Noorduyn Norseman
Le premier avion de brousse conçu et fabriqué au Canada, le
Norseman, est un grand avion de brousse. Son concepteur,
Bob Noorduyn, est né en Hollande en 1893. À la suite d’une
carrière chez divers avionneurs, il travailla avec Anthony
Fokker (Avions Fokker) en Allemagne. En 1921, il fut envoyé
à Teterboro (New Jersey) comme res-
ponsable d'une usine Fokker. Après 11
ans, il déménagea à Montréal et créa la
Noorduyn Aircraft Limited en 1933
(devenue Noorduyn Aviation en 1935).
Il se mit à l’œuvre afin de concevoir
(avec l'aide de pilotes de brousse) un
appareil de brousse adapté aux rudes
conditions canadiennes.
Dès le départ, l’avion fut conçu pour
recevoir des flotteurs, des skis ou des
roues facilement interchangeables.
C’est toutefois la version hydravion qui
fut initialement lancée. C’est d’ailleurs
équipé de deux flotteurs en catamaran
que le prototype effectua son premier
vol le 14 novembre 1935, à Pointe-aux-
Trembles. Le premier exemplaire du
monoplan à ailes hautes en bois et au
fuselage à tubulures d’acier entoilé fut
équipé d’un moteur Wright
R-975-E3 Wh i rlwi nd de
420 chevaux. L’appareil res-
s emb l a i t aux appa r e i l s
Fokker qu’il avait précédem-
ment conçus. Il devint rapi-
dement populaire autant du
côté civil que militaire, mais
il fut un temps où il éprouva
une légère baisse. En effet, le
1 5 d é c e mb r e 1 9 4 4 , l e
Norseman, qui transportait
le chef d'orchestre Glenn
Mi l l e r ( du B i g Band du
même nom), s'abîma dans la Manche. On n'a jamais retrouvé
son corps. À ce jour, des rumeurs persistent sur la nature
exacte de sa disparition, mais deux choses peuvent être
exclues : (1) Miller n'a pas été enlevé par des extra-terrestres
et (2) l'accident de l'avion n'a pas été causé par des défauts
de conception. L’hypothèse la plus probable est que son mo-
nomoteur ait été atteint en vol par des bombes non utilisées,
larguées par une formation de 138 Lancaster, la RAF rega-
gnant sa base après un raid avorté sur Siegen.
Noorduyn décéda en 1953, à South Burlington (Vermont).
Des 903 appareils construits entre 1935 et 1959, plus d’une
cinquantaine d’exemplaires de cet avion de brousse légen-
daire sont encore en état de voler.
Après une brillante carrière, le vénérable Norseman fit gra-
duellement place à des avions plus modernes, dont les célè-
bres DHC-2 Beaver et DHC-3 Otter.
À suivre…
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NOVEMBRE / DÉCEMBRE 2018
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SAVIEZ-VOUS QUE ...
Par Roger Coupal
| Archiviste, Fondation Aérovision Québec |
rcoupal@aerovision.orgLes destriers de brousse (1930-1940)
Norseman C64-A
sur flotteurs+roues.
Robert D.C. Noordyun.