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• Volume 35 Numéro 6 30 Base à finale : le virage le plus dangeureux! Texte : Gilles Jean Transports Canada, dans le cadre de sa Campagne de sécurité de l’aviation générale (CSAG), a développé une série de modules de formation qui visent à sensibiliser la communauté de l’aviation générale aux enjeux de sécurité. Transports Canada, ainsi que son homologue américain, le General Aviation Joint Steering Committee (GAJSC), se sont appuyés sur des statistiques récentes et ont constaté que la perte de contrôle en vol (LOCI) dans la taxonomie de l’OACI, est la principale cause de décès dans la communauté de l’aviation. Chaque année, des pilotes perdent la vie à cause de décrochages ou de vrilles principalement au décollage ou à l’atterrissage. Les décrochages peuvent arriver dans toutes les phases du vol, mais sont particulièrement meurtriers au décollage et lors du virage en f inale. La plupart du temps, ces pertes de contrôles sont causées par un virage mal coordonné et elles aboutissent en une vrille immédiate et soudaine. En f inale ou peu après le décollage, l’avion se trouve bien en dessous des 1000 pieds ce qui laisse peu de temps au pilote pour récupérer. Selon l’ Air Safety Institute il faut 1200 pieds pour sortir d’une vrille en toute sécurité. Tous les pilotes sont très familiers avec les décrochages pourtant, ces accidents arrivent souvent à des pilotes très expérimentés. Pourquoi? Premièrement, il y a une grande différence entre une vrille inattendue à basse altitude et les décrochages plani f iés qu’on nous a enseignés. Nous avons tous appris à maîtriser les décrochages en vol rectiligne principalement avec ou sans puissance. La pratique des vrilles en virage est beaucoup moins fréquente. C’est pourtant dans ces situations qu’elles se produisent. Lors des pratiques de décrochage, nous anticipons le décrochage et nous sommes prêts à intervenir. Dans la vraie vie, elles sont soudaines et surprennent. À basse altitude, ça ne pardonne pas. Deuxièmement, la plupart des pilotes ne sont pas conscients des situations les plus susceptibles de nous amener au décrochage. Ces situations se produisent lorsque nous sommes concentrés sur un objectif précis comme s’aligner sur la piste lors du virage en base. Aussi, nous nous sommes habitués à surveiller la vitesse indiquée qui est un gage d’absence de danger. Mais est-ce bien le cas? Le virage base à f inale : le virage le plus dangereux À l’atterrissage, le virage de base à f inale est le plus important et potentiellement le plus dangereux pour plusieurs raisons : 1) vous êtes à très basse altitude (500 pieds environ), 2) vous êtes lent, donc près de votre vitesse de décrochage et 3) vous avez le potentiel de partir en vrille causée par une situation de contrôles croisés si vous essayer d’effectuer une correction rapide a f in de vous aligner en f inale si vous avez dépassé l’axe de la piste. Examinons le scénario. Le vent est de 45 @12kt et vous voulez atterrir sur la 09 avec votre Cessna 172 R. Vous choisissez une vitesse de 70kts, soit un peu plus que 1,3 fois Vs. Donc, vous n’avez pas à craindre le décrochage et vous suivez votre routine habituelle. Mais n’avez-vous vraiment rien à craindre? Dans ce scénario, la composante vent-de-travers est de 10kts qui vous poussera vers la piste. Les pilotes expérimentés se mettront en crabe pour ne pas se laisser rapprocher de la piste, mais plusieurs s’en approcheront sans le réaliser ce qui leur laissera beaucoup moins de temps pour s’aligner sur l’axe de piste. De plus, après le virage en base, la vitesse au sol augmentera à cause de la composante vent-de-dos de 10kts ce qui vous laissera encore moins de temps pour vous aligner sur la piste. Vous risquez fort de dépasser l’axe de piste et c’est là que les choses risquent de se compliquer. « QUIZ DE SÉCURITÉ : DÉCROCHAGES ET VRILLES » Le ré f lexe naturel lorsque le pilote réalise qu’il dépassera l’axe de piste sera de corriger en augmentant l’inclinaison et de faire un virage serré. Qu’arrive-t-il à votre vitesse de décrochage lors d’un virage? À 45°, la vitesse de décrochage sera de 20% supérieure à celle en palier et à 60°, elle sera de 41% supérieure. Par exemple, un Cessna 172R qui décroche à une vitesse (Vs) de 51 nœuds (POH) décrochera à 61 nœuds à 45° d’inclinaison et à 72 nœuds lors d’un virage à 60°. Même dans un virage à 45°, si vous tirez le moindrement sur le gouvernail pour conserver votre altitude vous risquez de décrocher. Une situation encore pire se présente lorsque ne voulant pas augmenter trop l’inclinaison le pilote donne du palonnier à gauche ce qui alignera le nez sur l’axe de piste. L’avion est maintenant en dérapage ce qui fait baisser le nez et augmente l’angle d’inclinaison. La réaction normale sera de tirer sur le gouvernail pour garder son altitude et de mettre plus d’aileron dans la direction opposée plutôt de que relâcher le palonnier de gauche. Vous êtes maintenant en situation de contrôles croisés et en dérapage avec une perte d’altitude. La tentation de tirer encore plus sur le gouvernail sera forte.

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