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JUILLET 2020 57 Est ‐ ce que l’on peut enfin avoir un long moment de répit pour ce qui reste de la nuit? À ces latitudes, les nuits sont très longues. Les équipiers qui héritent du quart de 3 à 6 h ont la chance d’assister au lever du jour. Ce spectacle grandiose se joue à l’est sur notre ar ‐ rière. Ce matin, à ce qu’ils en disent, c’était féérique. Ils com ‐ muniquent leur joie avec un large sourire. C’est ainsi qu’ils narguent ceux qui terminent leur quart de repos. – Les boys, vous avez manqué un superbe lever du soleil. C’était vraiment beau à voir! Où étiez ‐ vous? Franchement, les bougres font exprès pour provoquer de l’animosité à notre bord. En réaction, il m’est adressé une vague de protestations venant des équipiers qui n’étaient pas dehors pour apprécier la naissance du jour. Pendant quelques secondes, je fais mine de ne pas entendre leurs récriminations, puis je prête une oreille attentive. – Skipper! Nous proposons un changement de quart. Nous aussi, nous aimerions pouvoir contempler les premiers rayons du soleil. Est ‐ ce possible que tu changes les horaires des quarts de nuit? – Rien n’est impossible. Sauf que nous arriverons à Natal dans moins de deux jours et que, la nuit prochaine, le ciel sera nuageux. OK! C’est bon, demain matin, j’irai vous réveiller... Ils me font la moue. Mes propos ne trouvent pas l’intérêt an ‐ ticipé. Il est plutôt absorbé par les arômes du déjeuner qui embaument le carré et réveillent l’appétit de mes affamés. Ce matin, je ne joue pas au cuistot, car la mer est suffisam ‐ ment calme pour que Grégoire et Mario se lancent dans la production de crêpes bretonnes. Ils besognent plus d’une heure pour réussir à calmer les appétits des ogres de la bande. Ils sont aussi occupés qu’une maman oiseau donnant la becquée à ses oisillons piailleurs. Maintenant, c’est au tour des deux équipiers ayant terminé leur quart de veille d’ap ‐ précier cette inhabituelle fantaisie culinaire. Pendant ces moments de pur bonheur où la troupe se rassemble autour de la table, Éva, la pilote automatique, tient un cap parfait sur Natal. Fréquemment, par l’entrée, je jette un coup d’oeil sur l’horizon afin de m’assurer que nous sommes toujours seuls sur cet océan sournois et que nous ne risquons pas de nous retrouver sur la route d’un paquebot. LISEZ-NOUS EN LIGNE pressenautique.ca

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